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Eclats de Paroles
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4 juillet 2005

33, rue du Blog (127)

Je dois bien avouer qu’un certains nombre de choses m’échappent à propos de la funeste nuit qui a suivi le PACS de Messieurs Alex et Adelin et qui a vu la naissance de…

Mais commençons par le commencement : vous vous souvenez sans doute que j’étais partie en catastrophe à la maternité en compagnie d’Agathe sur le point d’accoucher et d’Aurélien qui conduisait la voiture. Dès que ma colocataire a été installée dans sa chambre, celui-ci s’est éclipsé pour rejoindre le domicile conjugal et par la même occasion son infâme fée du logis. Je suis donc restée seule dans le couloir à faire les cent pas, rôle habituellement tenu avec plus ou moins de talent par le père, ce qui m’a valu quelques regards suspicieux et quelques sourires entendus d’autres visiteurs du service. Jusqu’au moment où le médecin de garde m’a abordée dans le couloir en me demandant

-         Ne me dis pas que tu es la…

Si, vous avez deviné, c’était Philippe, le beau toubib qui, dans une autre vie, m’avait donné le goût des gros cubes et des blousons de cuir avec un aigle sur le dos… mais je m’égare.

-         NON ! ai-je presque hurlé dans l’ambiance feutrée de la maternité. Je ne suis QUE la voisine de palier, la belle-sœur par la main gauche, la bonne poire de service !

Car cela commence à bien faire : dire qu’il y a un mois à peine, j’étais encore une célibataire libre et autonome et qu’en quelques semaines, je me suis retrouvée folle amoureuse (j’avoue…) d’un séminariste tatoué et logeuse malgré elle d’une adolescente enceinte jusqu’aux dents.

Le beau Philippe a froncé les sourcils, m’a doucement prise par le coude pour m’entraîner à l’écart (ce qui m’a provoqué une micro-crise de tachycardie pas désagréable) et m’a dit sur un ton très professionnel :

-         Qui que tu sois, sache que l’accouchement est difficile. Des jumeaux à son âge…

Autant dire que cette nouvelle a calmé ma crise de tachycardie. J’ai même cru que mon cœur s’arrêtait. Me voilà donc avec deux mouflets sur les bras pour le prix d’un, ai-je pensé in petto avant d’éprouver un léger malaise qui a permis à Philippe de me confier à une stagiaire infirmière manifestement plus paniquée que moi afin d’aller rejoindre sa parturiente.

A partir de ce moment-là, j’ai perdu la notion du temps et les choses ont complètement dérapé, même si au début elles m’ont semblé s’arranger avec l’arrivée d’Ambroise et du Père Boniface tout retournés par les derniers événements du 33, c’est-à-dire le meurtre de la vielle Durieux. Comme Xavier Lenoir avait établi qu’ils n’étaient pas passés par la résidence aujourd’hui, ils avaient été les premiers à être libérés et le Père Boniface avait proposé de déposer Ambroise à la maternité.

-         Alors, voilà donc le père, a risqué Philippe à la cantonade lorsqu’il les a vus tous les deux effondrés en bras de chemise à mes côtés. On peut dire que vous tombez bien. Etes-vous certains que la future Maman ne souffre d’aucune pathologie, ne présente aucune particularité génétique, car je crains bien que nous devions procéder à une césarienne.

-         Il me semble que j’ai un jour entendu Ghislaine lui dire qu’il devrait parler de quelque chose à son médecin en cas de grossesse, se souvint Ambroise, qui s’empressa d’ajouter : peut-être a-t-elle un document, un protocole dans ses papiers ?

-         Et bien, allez voir, s’est impatienté Philippe.

-         Mais oui, allez-y tous les deux, il y en a encore pour un moment, a renchéri le Père Boniface. Vous serez plus utiles à trouver ce papier ou à joindre cette Ghislaine qu’à tourner en rond ici.

Nous sommes donc partis dans la voiture du jésuite pour la rue du Blog où –une fois n’est pas coutume- une surprise de taille nous attendait : non seulement, la résidence était en ébullition, mais quand j’ai ouvert la porte de mon appartement, j’ai tout de suite compris qu’il s’était passé quelque chose de grave : mon malheureux philodendron monstera gisait sur le sol au milieu d’un tas de terreau échappé de son pot fracassé. Tous les bibelots étaient renversés, les tiroirs, ouverts, et l’unité centrale de mon PC avait disparu. La porte n’était pas fracturée, mais il avait été facile pour les voleurs de se hisser au premier étage par la même gouttière qui avait sauvé la vie d’Aurore il y a quelques jours. J’ai eu le plus grand mal à réprimer les larmes qui me montaient aux yeux. Ambroise s’est repris plus rapidement que moi. Il m’a entraînée au dehors en m’expliquant « Nous n’avons rien à faire ici. Nous ne retrouverons pas les papiers d’Agathe. Laissons donc faire Xavier Lenoir qui sera certainement très intéressé par la superbe empreinte de pas dans le terre de ta plante verte. Allons plutôt rejoindre ma sœur à la clinique. » Où mes larmes se sont transformées en rire nerveux.

Nous y avons en effet découvert le Père Boniface décomposé, les yeux cette fois-ci complètement exorbités, ses grosses lèvres tremblantes, gémissant « Ils ne sont pas de moi, ce n’est pas possible… » tandis que Philippe lui tapotait amicalement la main en lui disant « Allons, allons, Boniface, un peu de courage, vous n’êtes pas le premier à qui cela arrive. Vous serez mesure de faire face. D’ailleurs, ils vous ressemblent tous les deux, surtout le petit garçon, et croyez-moi, j’ai de l’expérience en la matière… Si, si, tous les nouveaux-nés ont la peau claire, mais d’ici quelques jours, elle va foncer. Allons Boniface, reprenez-vous. Que va penser la maman à son réveil ? »

Oui, décidément, le Père Boniface, il s’en souviendra de cette nuit du Solstice d’été 2005.

Au fait, Agathe a décidé d’appeler ses enfants Adeline et Axel en hommage à nos deux pacsés dont elle estime avoir un peu gâché la fête. Elle est comme ça, Agathe, pas simple comme fille, mais pleine d’attentions…

Armelle

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