HISTOIRE DE CHAPEAUX

            Une histoire de chapeaux, c’est un peu l’histoire d’une vie. 

            Le premier était rond, en paille marine tressée, les bords aimablement relevés sur un visage d’adolescente.  Elle l’avait choisi pour sa sobriété qui allait à son teint pâle et à ses yeux clairs.

            Car le chapeau se doit de tout peser, tout évaluer, il est le point final d’une silhouette, il lui donne son allure ou l’écrase de son poids.  Il a des ailes ou au contraire, il empèse celle qui le porte.  Elle le choisit inconsciemment proche de son humeur ou de sa personnalité.  Il est en feutre rouge, pimpant et rigolo, chez la jeune femme délurée qui l’exhibe avec piquant. Un autre se couche mystérieusement sur le côté en un plissé délicat  et ombre un regard bleu qui intrigue.  Voyez celui-ci, de paille noire, à bords légers, sur lequel un oiseau s’est couché, étalant des plumes blanches et soyeuses. Et cet autre, un rien ridicule, bordeaux, totalement déhanché, couvrant d’un côté une oreille, grimpant de l’autre côté  à l’assaut  d’on ne sait quoi. 

            La mode insuffle des goûts débridés.  J’ai la nostalgie de ce chapeau blanc à fond haut, dont les bords rabattus voilaient le front et les yeux.  De toucher soyeux, il avait la douceur d’une intrigue.

            Plus drôle, ce bibi sans façon, enfoncé comme on veut, mais surmonté d’une plume pointue, blanche et noire, bougeant au gré des mouvements de la tête.  Je le portais dans ce vieux train provincial, où les voyageurs s’asseyaient dos à dos sur les sièges de bois ; le train faisait son petit voyage à l’aise, et en se levant pour déposer son bagage dans le filet, on apercevait les voisins par-dessus les dossiers.  J’entendis soudain un refrain à la mode  repris en chœur :

            - Elle avait une plume, plume, plume à son chapeau…

            C’était un groupe de joyeux scouts qui, à ma confusion amusée,  avait repéré le couvre-chef.   Et les toques ! Que dites-vous des toques, blanches, noires,  en fourrure,

inclinées sur l’œil, droites comme des soldats au garde-à-vous, mutines vers l’arrière, provocantes quand une mèche bien choisie s’échappe en accroche-cœur au-dessus du sourcil ou sous l’oreille ?  Et les bérets ?  Fous, fantasques, chiffonnés ou munis d’un ruban rigide sur le front, tandis qu’ils gonflent à droite ou à gauche, selon la fantaisie et la couleur choisie.  Car le béret beige n’a rien du béret rouge, beaucoup plus coquin, ni du béret noir, inaperçu.

            J’ai dans l’oreille l’ancienne chanson de Maurice Chevalier, remise à l’honneur par Guy Marchand dans un film dont j’ai oublié le titre, hélas, mais qui représentait bien un certain esprit :

            « Avez-vous vu

             Le joli chapeau de Zozo

            C’est un chapeau, un chapeau

            Rigolo

            Sur le devant

            On a planté trois plumes de paon

            Et sur le côté

            Un amour de perroquet »…

            C’était l’époque des chapeaux.  Pas la nôtre.  On en riait, on en médisait, on les aimait.  On les a jetés aux orties, enfin presque.  Quelques femmes s’en parent encore pour donner à leur vie une fantaisie coquette qui interroge : « Pourquoi ne porte-t-on plus de chapeaux ? »

            Au fait oui, pourquoi ?

M.E.

Comments

[Marthe]

L'idée est excellente, Annie! D'autant que chacun aura cherché dans ses malles le chapeau démodé qu'il remettra au goût du jour!

Des photos seraient les très bienvenues!

Amitié et joyeuse fête!

Marthe

[aNNIE]

Chère Marthe,
Pour te rassurer, j'organise ce samedi une fête de famille pour célébrer divers anniversaires et le mot d'ordre est : " CHAPEAU !"
Chacun, chacune des invités, parents, grand-parents, petits-enfants devra obligatoirement se présenter avec un chapeau...
Tous ont trouvé l'idée bonne.... à condition de ne pas garder le chapeau toute la journée !
On va voir...
A l'occasion je te montrerai des photos...
Annie