VIERGE A L'ENFANT
Lors d'une journée consacrée à l'art, il fallait choisir un tableau ou un objet que l'on aimait beaucoup. Puis, notre coquine d'animatrice, demandait que nous expliquions pourquoi nous... ne l'aimions pas.
Voici ce que cela a donné.
Qui a dit que les frères Van Eyck sont des génies précurseurs ? Bon, d’accord, ils ont inventé la peinture à l’huile. Ce n’est pas la pire invention de l’humanité, mais, reconnaissons-le, pas la plus utile non plus. Donc, passons. Mais leurs tableaux, les avez-vous déjà bien regardés ? Des taches, oui. Cette Vierge à l’enfant, par exemple. A-t-on idée de représenter une scène évangélique de la sorte ! D’abord, le pt’it Jésus, il est né dans une crèche à ce que racontent Marc, Luc et les autres. Il a grandi à Bethléem, qui n’était pas Byzance, que je sache, même si Bethléem-Byzance, c’est plus ou moins dans le même coin d’Orient, mais côté luxe et paillettes… Enfin, bref, vous avez compris.
Or, que voit-on sur ce tableau ? Une humble masure de Palestine ? Pas du tout ! Un palais, oui ! Pis : un palais de chez nous, d’ici, de Belgique, du Payottenland même, le paysage aperçu par la fenêtre ne laisse aucun doute là dessus. Et dans ce palais, voilà-t-y pas que la Vierge, qui était tout de même la femme du charpentier, se prélasse en habits de brocard. Vous me direz, c’est son droit le plus strict, si elle a les sous pour. D’accord, mais ce que moi je ne comprends pas c’est pourquoi, diable, elle prend son bébé tout nu sur les genoux ? A croire qu’elle ne songe pas un instant qu’il pourrait faire pipi sur sa jolie robe. Ou autre chose. Car n’allez pas croire : ça ne se lave pas facilement, le brocard. Et puis à l’époque, le nettoyage à sec n’existait pas. Allez ! On voit bien que Jan et Hubert étaient des hommes pour ne pas penser à ces choses-là. Jamais une femme n’aurait commis une telle erreur. Mais, à l’époque, les femmes n’étaient pas peintres. Elles ne pouvaient pas, ou n’avaient simplement pas le temps.
Et puis, dites-moi un peu, cet ange niais qui tend une oeillet à l’enfant nu : il veut le tuer ou quoi ? Qu’espère-t-il qu’un enfant de quelques mois fasse d’une fleur, sinon la porter à sa bouche ? Or, un œillet, c’est du poison pour un petiot comme celui-là. Non, décidément, l’inspiration des frères Van Eyck, c’est d’un primitif ! Tenez, foi d’Angélique, je crois que je préfère encore ces masques de sauvages que l’on appelle « art brut ».
Marianne V.