Manet et Freud!

Edouard,

Suis-je  belle  ?

Cela fait des années

Que je me torture les méninges

Sur le divan de Sigmund

Mais il n’est que silence

Quand je lui pose la question…

pour la énième fois

Je suis paraît- il ,

son continent noir…

Le noir

De la nuit éteinte

Quand ton regard s’égare sur une autre que moi

Pourquoi me fais tu blanche ?

Le noir

De la boue collante

A  ma peau de modèle à ne pas suivre

Quand je m’évade dans d’autres bras

Pourquoi me fais tu lumière ?

Le noir

De mes idées impossibles

A colorier sur ton tableau de toile

Et que tu traduis par un sourire qui ne m’appartient pas

Pourquoi m’aimes tu ?

Le noir

De mon sexe   

Enterré en moi

Pourquoi me désires-tu ?

Edouard !

Tu me dessines

Tu me peins ,

Avec  tes mains,

Tes doigts

Ton génie

Ton âme

Tu me fais nue

Alors que je  suis armure

Tu me fais douce

Alors que je  suis  cri

Tu me fais  éternelle

Tu me fais déesse

Mais c’est une autre que moi que tu célèbres

Et que je ne connais pas.

Comment s’appelle t- elle ?

Peu importe…

Moi,

Sur le divan,

Je suis…

J ’y reste…

Monique.

Comments

[Marthe Englebert]

Très hablement entrelacés, Manet et Freud, Monique! Que de pensées traversent l'esprit de la belle! Et sans en avoir l'air, tu dépeins un Manet vu par d'autres yeux que ceux de ses admirateurs: les yeux du modèle, qui sait bien n'être que l' "interprétation" d'un génie.

Merci, Monique, d'y avoir aussi intégré le "noir" dont l'ébène rehausse la clarté du blanc...

Marthe